Nu pot decat sa transcriu ce mai citesc. Brexit ma scoate din sarite, desi stiam ca numarul prostilor e considerabil mai mare decat al celor cu ceva doxa.
„Libération”
„Et maintenant ? Comme il fallait s’y attendre, les Etats membres et les institutions communautaires n’ont aucun plan B, pas plus que les partisans britanniques du Brexit. D’où le flottement actuel, tant à Bruxelles que dans les capitales européennes. Tout se passe comme si personne n’avait osé envisager le pire, pariant sur une vision idéalisée du fameux «pragmatisme» anglais. Faute de préparation, il ne faut donc pas s’attendre à ce que les chefs d’Etat et de gouvernement, qui se réunissent mardi et mercredi à Bruxelles, ou encore le Parlement européen, qui tient une session extraordinaire mardi, proposent une réponse ambitieuse au séisme politique que vient de vivre l’Union. «On ne peut pas préparer un nouveau traité dans les quinze jours», a reconnu Emmanuel Macron, le ministre de l’Economie, samedi, lors d’un débat à Sciences-Po Paris.
Il est vrai que la réaction des Vingt-Sept dépendra de l’analyse qu’ils feront des raisons du vote négatif des Anglais et des Gallois, mais aussi de la réaction de la classe politique britannique. Pour l’instant, la poussière de la déflagration du leave est loin d’être retombée, à tel point qu’on ne sait pas encore si et quand Londres activera l’article 50 du traité sur l’Union qui enclenche le processus de sortie. Outre que le référendum est consultatif, il faudra que le gouvernement de Sa Gracieuse Majesté obtienne une majorité à la Chambre des communes, où les «Bremain» sont largement majoritaires, mais aussi, semble-t-il, au sein des Parlements régionaux : or l’Ecosse n’a aucune intention de faciliter la tâche des Brexiters… Un beau casse-tête constitutionnel en perspective.
… les 27 capitales reconnaissent que le projet européen est en danger, euroscepticisme et nationalisme ayant le vent en poupe partout dans l’UE. Il faut donc le remettre d’aplomb afin de répondre aux préoccupations des citoyens. Plus facile à dire qu’à faire.
Comment ne pas paralyser l’UE ?
C’est le cauchemar des Européens : que les négociations du Brexit durent des années et paralysent l’UE. Car, tant que le Royaume-Uni n’est pas sorti, il siégera au sein des instances et pourra poser son veto à toute réouverture des traités, par exemple. Face aux hésitations de Londres, David Cameron, le Premier ministre britannique, laisse à son successeur le soin d’activer l’article 50. Et Boris Johnson, leader des leave au sein du Parti conservateur, considère qu’il n’y a aucune urgence à le faire. Les ministres des Affaires étrangères des six pays fondateurs de l’UE (France, Allemagne, Italie, Belgique, Pays-Bas, Luxembourg), réunis samedi à Berlin, ont, eux, invité le Royaume-Uni à lancer «le plus vite possible» la procédure de sortie. «Nous disons ici, ensemble, que ce processus doit commencer aussi vite que possible pour qu’on ne se retrouve pas embourbés», a martelé le ministre allemand, Frank-Walter Steinmeier. Le Parlement européen devrait adopter mardi une résolution semblable : il faut couper les ponts au plus vite avec le Royaume-Uni pour éviter le pourrissement. A Bruxelles, on multiplie les gestes symboliques : les 27 représentants permanents (ambassadeurs) des Etats membres se sont réunis dimanche sans leur collègue britannique pour préparer le sommet de mardi et de mercredi, et il est déjà prévu que Cameron sera exclu du sommet de mercredi. Toujours pour accroître la pression, le Polonais Donald Tusk, qui préside le Conseil européen, a désigné samedi le Belge et fonctionnaire européen Didier Seeuws comme chef de la «Brexit task force», alors que la Commission mettait en place un groupe équivalent pour préparer les futures négociations.
Reste à savoir si les Vingt-Sept sont sur la même longueur d’onde. A Paris, on reconnaît «que si le SPD [Parti social-démocrate allemand, ndlr] ou Wolfgang Schäuble [le ministre des Finances] sont d’accord pour accélérer les choses, la chancelière n’est pas encore parfaitement alignée. Comme dans le cas de la Grèce, elle veut se donner du temps».D’autant que l’activation de l’article 50 recouvre une seconde question : comment éviter que Londres refuse de le faire tant qu’il n’a pas obtenu l’assurance d’un futur statut préférentiel qui ne le coupera pas du marché intérieur, élément vital pour lui ? «L’article 50 n’a pas été conçu pour servir d’instrument de chantage. Un pays peut sortir, mais c’est seulement ensuite qu’on se mettra d’accord sur un futur statut»,insiste un diplomate français. Or plusieurs Etats pourraient accepter de se montrer conciliants : d’abord l’Allemagne et les Pays-Bas, qui réalisent à eux deux plus de la moitié de l’excédent commercial de l’UE avec le Royaume-Uni, mais aussi les pays du Nord dont l’anglophilie n’est plus à démontrer.
«Mark Rutte [le Premier ministre néerlandais], après avoir hésité, a admis que toute attitude trop conciliante serait utilisée par les europhobes comme argument de campagne pour montrer qu’une rupture n’est pas si grave, explique-t-on à Paris. Nous avons le même problème, tout comme Matteo Renzi en Italie.» On se dit confiant qu’au final Merkel, pas aussi menacée par les populistes que Hollande, soutiendra le point de vue français. Mais l’attitude des autres pays n’est absolument pas garantie : ce sera l’un des principaux enjeux du sommet de mardi et de mercredi.
Qui veut relancer l’Union ?
Si Hollande a immédiatement affirmé que «l’Europe ne peut plus faire comme avant» et que Manuel Valls a appelé à «refonder, réinventer une autre Europe en écoutant les peuples», la prudence l’emporte dans la plupart des autres capitales, où l’appétence pour une remise à plat du projet européen est plus que limitée. Surtout, Allemands et Français ne sont pas d’accord entre eux sur les contours d’une telle relance, qui passerait nécessairement par une réforme des traités. Car expliquer que l’Europe ne fait pas assez pour les gens est pour le moins limité, les régions anglaises les plus aidées financièrement par l’UE étant souvent celles qui ont le plus massivement voté pour le Brexit…
En fait, depuis l’élection de Hollande, le couple franco-allemand se porte mal, en dépit des dénégations de Paris. En grande partie parce que Berlin n’a plus grande confiance en son partenaire, s’inquiétant de sa capacité à réformer son économie. Mais aussi parce que le chef de l’Etat n’a jamais formulé la moindre proposition concrète acceptable par l’Allemagne : celle-ci refuse d’aller plus loin dans l’intégration politique sans une modification des traités qui permettrait de démocratiser la zone euro. Zone qui fonctionne en dehors de tout contrôle parlementaire, européen ou national. De fait, Hollande craint par-dessus tout de devoir convoquer un référendum pour changer les traités, référendum qu’il serait certain de perdre. Mais pour Berlin, des changements «à traités constants»sont inacceptables : le gouvernement est soumis à la pression de sa Cour constitutionnelle, qui a déjà jugé à plusieurs reprises que l’UE est un trou noir démocratique. Ce qui fait obstacle à tout partage de souveraineté supplémentaire. Pas question donc d’un budget de la zone euro ou d’un Trésor capable de lever l’emprunt sans contrôle parlementaire. Une contradiction dans laquelle s’est empêtré le couple franco-allemand.
Cela étant, tout n’est pas de la faute de Paris : outre-Rhin, la crise de la zone euro et la solidarité forcée à l’égard de la Grèce ont laissé des traces profondes, tout comme la politique monétaire trop accommodante de la Banque centrale européenne, qui a jeté par-dessus bord tous les fondamentaux de la Bundesbank : «La chancelière nous a dit qu’elle était épuisée par la crise grecque et qu’il ne fallait pas compter sur elle pour aller plus loin dans l’approfondissement de la zone euro», confie un responsable français.
Or sans un couple franco-allemand en ligne, rien ne peut se faire, comme l’a rappelé dimanche le Président : «Il est de la responsabilité de la France et de l’Allemagne de prendre l’initiative.» Matteo Renzi, le président du Conseil italien, conscient de ce blocage, a imaginé un nouveau moteur, celui que pourraient former les six Etats fondateurs. Son idée serait qu’ils accouchent d’une proposition de nouveau traité pour le 60e anniversaire du traité de Rome, en mars 2017. Mais, là aussi, ça coince, plusieurs pays, dont l’Espagne, n’appréciant pas de se retrouver mis sur le côté… Et ce format n’a pour l’instant pas permis de surmonter les divergences franco-allemandes. Enfin, parmi les autres pays européens, aucun n’est demandeur d’un approfondissement de l’UE, en particulier les pays nordiques et d’Europe centrale…
Relancer pour quoi faire ?
Tirer les leçons du Brexit n’est pas simple, puisque le Royaume-Uni avait un statut à part au sein de l’UE et ne participait pas aux politiques les plus intégrées : monnaie unique, union bancaire, Schengen, politique d’immigration et d’asile, etc. En outre, Cameron avait obtenu de ses partenaires en février de nouvelles clauses dérogatoires qui lui auraient notamment permis de discriminer les ressortissants européens sur le plan des prestations sociales… Mieux, les accusations de déficit démocratiques, en ce qui la concerne, tombaient à plat : le marché intérieur et la politique agricole commune sont, depuis le traité de Lisbonne, totalement contrôlés par le Parlement européen et la Commission a commencé sa mue démocratique en 2014, son président étant désormais directement issu des élections européennes. Autrement dit, sauf à déconstruire l’UE, on ne voit pas bien l’enseignement qui pourrait être tiré de cette consultation, si ce n’est éventuellement en mettant au clair la répartition des compétences entre niveau européen et niveau national.
En revanche, personne ne peut nier la montée de l’euroscepticisme, notamment au sein des 19 pays de la zone euro. C’est là le principal enjeu, comme l’a parfaitement compris Hollande, qui a appelé à un«renforcement de la zone euro et de sa gouvernance démocratique». Ce qui passe par une réforme des traités, afin d’instaurer un contrôle parlementaire donnant enfin la parole aux citoyens sur la gestion de la zone euro. A l’Elysée, on l’admet enfin, mais on renvoie la réforme après 2017…
Comment réformer ?
La tentation française est de négocier un nouveau traité entre Etats, et comme d’habitude, à charge pour chacun de le faire ensuite ratifier. Une méthode qui échoue de plus en plus, comme le montre la succession de référendums négatifs sur l’UE. «Il faut procéder autrement en lançant des conventions citoyennes à travers l’Europe, a plaidé Macron, samedi. Un projet de refondation, ça doit se construire avec les gens, à partir d’un débat démocratique.» Pour éviter 27 référendums, il plaide pour une «consultation transeuropéenne».Les Etats seront-ils prêts à une telle révolution ? De la réponse qu’ils apporteront à cette question dépend le futur de l’UE. Et les vingt dernières années n’incitent guère à l’optimisme.
Jean Quatremer