Visite dans un cimetière à la campagne*

 

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Par Henri Nouwen

„Chaque fois que je vais visiter mon père à Geysteren, je me rends à ce petit cimetière. Près de l’entrée, sur le côté gauche, se trouve la tombe de maman, avec une croix de bois toute simple, portant son nom et les dates de sa naissance et de sa mort, peints en blanc. Des plantes vivaces entourent l’endroit où repose son corps, et, au centre, poussent des violettes. Quand je me tiens devant cette tombe si dépouillée, les yeux à la croix, à écouter la brise chanter dans le feuillage des peupliers, je sais que je ne suis pas seul.

Maman est là, et elle me parle. Aucune voix mystérieuse ne se fait entendre, mais elle est là avec moi, comme toujours. Et cela en dépit des quatorze années écoulées depuis son départ. Je le sais, puisque j’en ai une connaissance intime. Bercé par le calme de ce beau cimetière où il m’est si facile de me recueillir en solitude, j’entends maman me parler : elle me dit que je dois rester fidèle à mon propre voyage, et qu’il ne faut pas avoir peur face à la perspective de la rejoindre un jour dans la mort.

 Comme je me tiens là, devant la tombe de ma mère, les cercles de défunts qui m’entourent s’élargit. Je ne suis pas seulement au milieu des villageois de Geysteren qui ont ici leur sépulture, mais aussi parmi des gens de ma famille et des amis. Le cercle de ceux dont les actes et les paroles ont façonné ma vie et ont modelé mes pensées est encore plus large. Au-delà, il y a les innombrables cercles d’hommes et de femmes dont je ne connais pas les noms : tout ce que je sais, c’est qu’ils ont fait le même voyage que je fais, qu’ils ont connu, chacun à sa façon, les peines et les joies de la vie humaine.

 Les peupliers de ce petit cimetière à Geysteren murmurent leur chant pour tous ceux qui y ont leur sépulture et pour tous les autres défunts. Il y en a qu’on a déposés dans leur tombe avec tendresse, comme le fut ma mère, mais d’aucuns y ont tout bonnement été déposés puis oubliés. Sans compter les nombreux êtres humains jetés dans des fosses communes dont peu de gens connaissent l’emplacement, où personne ne vient jamais se recueillir. Pour tous, chante le bruissement des feuilles de ces peupliers ; et moi, me tenant debout parmi les tombes, j’éprouve de la gratitude pour ce que je suis – un être humain comme l’ont été tous les défunts ensevelis ici ; comme eux, je suis aussi appelé à mourir un jour. Pour cela aussi, je suis reconnaissant.

C’est un grand don de savoir au plus profond de soi que nous sommes tous frères et sœurs dans la grande famille humaine et que, quelques différents que soient nos cultures, langues, religions, quel que soit notre style de vie, ou notre travail, nous sommes tous des mortels appelés à remettre nos vies entre les mains d’un Dieu aimant. Quel don, de se sentir lié à tant et tant d’autres hommes qui ont fait le grand passage; oui, c’est une source de paix et de sérénité… Quand je fais l’expérience de ce lien, je comprends d’une manière nouvelle ce que c’est qu’accompagner ceux qui meurent. C’est les relier au grand nombre de ceux qui quittent ce monde maintenant ou qui l’ont fait, et leur faire découvrir que la chaîne humaine remonte très loin, que la solidarité humaine va jusqu’au-delà des frontières de nos courtes vies.

 Frères et sœurs, ce passage est pour tous.”

* D’après Our Greatest Gift, a Meditation on dying and caring, 1994.

 

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