Le Père abandonné

      Il y a tant d’années que je suis à ton service
sans avoir jamais transgressé tes ordres.

Évangile selon saint Luc, chapitre 15, verset 29

Être en règle, être irréprochable, c’était l’idéal du fils aîné, l’accomplissement de la loi ! Mais le cœur n’y est pas. Son obéissance reste un devoir froid, sans vie. Et le Père se sent si seul. « Tout ce qui est à moi est à toi… » A-t-il jamais été compris par ses enfants ? A-t-il jamais été compris par ce fils aîné toute sa vie à ses côtés ? Quand son frère revient, le jugement de l’aîné est sans appel : la vie avec mon père est injuste, cherchons la consolation ailleurs. Serait-ce que servir son père rendrait triste ? Lui travaillait dans le domaine paternel, nous, nous travaillons dans la vigne du Seigneur. Notre foi nous rend-elle joyeux ?
Dans l’Évangile, un autre homme est reparti tout triste. Lui aussi irréprochable devant la loi. Quand Jésus lui rappelle les commandements, il répond : « Tout cela, je l’ai observé depuis ma jeunesse. »*

Droiture parfaite, mais sans écoute, sans dialogue, sans intimité. Une observance sans faille, mais qui ne permet pas de rencontrer Dieu de l’intérieur. « Une seule chose te fait encore défaut : vends tout ce que tu as, distribue-le aux pauvres et tu auras un trésor dans les cieux. » Jésus ne lui donne pas un devoir de plus, mais une invitation à écouter son désir intime, à suivre sa soif d’une plus grande liberté : « Puis viens, suis-moi. »
Revenir en arrière, rembobiner le fil de sa vie n’est pas toujours facile. Cependant, la vie n’est pas un automatisme. La liberté fondamentale de l’homme demeure toujours intacte, de sorte que tu peux toujours changer de direction. « Suis-moi », dit Jésus et « entre dans la joie de ton Seigneur »**.

* Évangile selon saint Luc, chapitre 18, verset 21.
** Évangile selon saint Matthieu, chapitre 25, verset 21.
Méditation enregistrée dans un studio de RCF Bruxelles.

Le Père abandonné

Pardonne !

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Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 18,21-35.

En ce temps-là, Pierre s’approcha de Jésus pour lui demander : « Seigneur, lorsque mon frère commettra des fautes contre moi, combien de fois dois-je lui pardonner ? Jusqu’à sept fois ? »
Jésus lui répondit : « Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dix fois sept fois.
Ainsi, le royaume des Cieux est comparable à un roi qui voulut régler ses comptes avec ses serviteurs.
Il commençait, quand on lui amena quelqu’un qui lui devait dix mille talents (c’est-à-dire soixante millions de pièces d’argent).
Comme cet homme n’avait pas de quoi rembourser, le maître ordonna de le vendre, avec sa femme, ses enfants et tous ses biens, en remboursement de sa dette.
Alors, tombant à ses pieds, le serviteur demeurait prosterné et disait : “Prends patience envers moi, et je te rembourserai tout.”
Saisi de compassion, le maître de ce serviteur le laissa partir et lui remit sa dette.
Mais, en sortant, ce serviteur trouva un de ses compagnons qui lui devait cent pièces d’argent. Il se jeta sur lui pour l’étrangler, en disant : “Rembourse ta dette !”
Alors, tombant à ses pieds, son compagnon le suppliait : “Prends patience envers moi, et je te rembourserai.”
Mais l’autre refusa et le fit jeter en prison jusqu’à ce qu’il ait remboursé ce qu’il devait.
Ses compagnons, voyant cela, furent profondément attristés et allèrent raconter à leur maître tout ce qui s’était passé.
Alors celui-ci le fit appeler et lui dit : “Serviteur mauvais ! je t’avais remis toute cette dette parce que tu m’avais supplié.
Ne devais-tu pas, à ton tour, avoir pitié de ton compagnon, comme moi-même j’avais eu pitié de toi ?”
Dans sa colère, son maître le livra aux bourreaux jusqu’à ce qu’il eût remboursé tout ce qu’il devait.
C’est ainsi que mon Père du ciel vous traitera, si chacun de vous ne pardonne pas à son frère du fond du cœur. » 

Commentaire du jour :  Saint Césaire d’Arles (470-543)

Vous savez ce que nous dirons à Dieu dans la prière avant d’en arriver à la communion : « Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés ». Préparez-vous intérieurement à pardonner, car ces paroles, vous allez les rencontrer dans la prière. Comment allez-vous les dire ? Peut-être ne les direz-vous pas ? Finalement, telle est bien la question : direz-vous ces paroles, oui ou non ? Tu détestes ton frère, et tu prononces « Pardonne-nous comme nous pardonnons » ? — J’évite ces mots, diras-tu. Mais alors, est-ce que tu pries ? Faites bien attention, mes frères. Dans un instant, vous allez prier ; pardonnez de tout votre cœur ! 

Regarde le Christ pendu sur la croix ; écoute-le prier : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23,34). Tu diras sans doute : lui pouvait le faire, pas moi. Je suis un homme, et lui, il est Dieu. Tu ne peux pas imiter le Christ ? Pourquoi alors l’apôtre Pierre a-t-il écrit : « Le Christ a souffert pour vous, il vous a laissé un exemple, afin que vous suiviez ses traces » (1P 2,21) ? Pourquoi l’apôtre Paul nous écrit-il : « Soyez les imitateurs de Dieu comme des fils bien-aimés » (Ep 5,1) ? Pourquoi le Seigneur lui-même a-t-il dit : « Mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur » (Mt 11,29) ? Nous biaisons, nous cherchons des excuses, quand nous prétendons impossible ce que nous ne voulons pas faire… Mes frères, n’accusons pas le Christ de nous avoir donné des commandements trop difficiles, impossibles à réaliser. En toute humilité, disons-lui plutôt avec le psalmiste : « Tu es juste, Seigneur, et ton commandement est juste » (Ps 118,137).

 

 

Premier dimanche du Carême

Il fut conduit par l’Esprit à travers le désert où, pendant quarante jours, il fut mis à l’épreuve par le démon. (Luc 4,1)

Quand l’épreuve est là

Avec leur froid intense, piquant, les nuits sont terribles dans le désert.

Les jours aussi, sous un soleil de plomb. C’est en ce lieu où la vie humaine est si fragile, si menacée, que l’Esprit a conduit Jésus après le baptême dans le Jourdain.

Au bout de quarante jours de grâces et d’épreuves, Jésus eut faim et, peut-être, peur.

C’était l’heure des ténèbres, propice au tentateur.

« Pourquoi t’a-t-on abandonné ici, parmi les bêtes sauvages ? Ne vas-tu pas mourir de faim ? Où est-il, ton Dieu, où en sont ses promesses ?»

« Par contre, si vraiment tu es le fils de Dieu…

… tu devrais pouvoir faire des miracles, te nourrir et nourrir tous les affamés, régner sur ton peuple pour son plus grand bien et ta plus grande gloire… affronter les lois de la nature… Il suffit d’oublier Dieu et m’adorer, moi ! » 

Aux propositions alléchantes du diable, Jésus a résisté par la force de ce qui « est écrit ». 

La Parole divine, nous enseigne-t-il, est la meilleure arme contre la tentation, qu’elle soit tentation de l’idolâtrie, du doute, de la suspicion, du pouvoir, ou celle de l’indifférence face à la souffrance d’autrui. Quant à nous, combien de fois n’avons-nous pensé, même sans oser le dire, que Dieu devrait régler tous nos problèmes, « s’il existait »… ?

Faisons donc comme Jésus quand il fut tenté dans le désert.

Combattons avec l’arme de la Parole.

N’hésitons pas à nous y plonger, à en faire notre prière, à la laisser travailler en nous. Le réconfort de Dieu est au bout.

 

 

 

 

 

 

 

Joie pour Dieu, paix pour nous

Quel est donc le jeûne qui me plaît ?

Isaïe 58,6

Celui qui a peu partage facilement.

A l’inverse de celui qui se sent diminué quand il se sépare du moindre sou.

Notre partage, matériellement parlant, peut être modeste.

Mais, s’il est communication avec Dieu, dans la prière, sa portée est infinie.

Que nous organisions une quête, que nous consentions à un petit sacrifice pour venir en aide à quelqu’un, ou que nous persévérions dans la prière d’intercession, le résultat est le même.

De notre côté, il y a le bonheur de se sentir uni au Dieu Un…

… et du côté du ciel, il y a la joie que notre offrande suscite dans le cœur du Père.

D’autant plus que cette façon d’adorer Dieu est celle qu’il dit expressément préférer :

« Quel est donc le jeûne qui me plaît… ? N’est-ce pas partager ? » 

11 février : Notre Dame de Lourdes